J’aime pas la pluie

Libre

Aujourd’hui, je devais m’occuper de fermer la boutique. Avec la pluie que s’abattait durement sur le toit de la bâtisse, très peu de clients se sont présentés au courant de la journée. J’en avais donc profité pour faire l’inventaire, mais disons que malgré cette occupation, la journée était bien partie pour être longue. Une fois l’inventaire terminé, il n’y avait toujours pas de client en vue. Je me permis de tout fermer, une vingtaine de minutes avant l’heure de fermeture. Il ne risquait pas d’avoir de visite entre-temps. Par la fenêtre, la pluie venait s’éclater contre la vitre, elle ne semblait pas vouloir se dissiper d’aussitôt. Je me dirigeai donc vers la salle des employés pour y récupérer mon manteau et mon parapluie, heureuse d’avoir pensé de le transporter avec moi. Après avoir pris le temps de barrer la porte de la boutique et d’avoir ouvert mon parapluie, d’un noir uni, je me dirigeai d’un pas pressé en direction de mon appartement. Je ne souhaitai pas rester longtemps sous cette pluie. Un bel orage avait éclaté et on pouvait entendre au loin des grognements qui retentissaient. Avec un temps pareil, il est préférable de rester tranquille au chaud chez soi.

Tandis que je marchai, la sonnerie de mon téléphone se fit entendre. Je m’arrêtai pour farfouiller dans mon sac, mais avec mon parapluie qui m’encombrait et les gouttelettes de pluie qui arrivait dans mon visage, je n’arrivai pas bien à chercher. Voyant un gros rocher sur le côté de la route, je mis rendis pour m’appuyer contre lui. Ainsi je me retrouvai à l’abri du vent et me permis d’enfin retrouver mon téléphone au fond de mon sac.

Lorsque je découvris le destinataire de l’appel, je restai figée un instant devant l’appareil. C’était encore ma mère qui tentait de me contacter. Je ne lui avais pas donné de nouvelles depuis un certain temps pour une bonne raison, je savais pourquoi elle persistait à m’appeler et je refusais de l’entendre. Après avoir lâché un soupire, je bloquai son appel, comme je le faisais souvent ses derniers temps. J’observai pendant un bref instant la photo de ma sœur et moi que j’utilisai comme fond d’écran avant de refermer l’appareil et de le ranger à nouveau dans mon sac.

À ce moment, j’entendis derrière moi une personne chanter. Je me retournai prestement pour y découvrir un jeune garçon assis sur le haut du rocher. Pourtant, il me semblait n’avoir personne lorsque je me suis approchée et encore moins entendu. La pluie l’avait peut-être camouflé. Lorsque le garçon comprit que je l’observais, il s’arrêta de chanter et me fixa de ses yeux écarlates. Quel étrange garçon. Sa chevelure blonde était aplatie contre sa tête due à la pluie et des gouttelettes d’eau y ruisselaient. Je fronçai les sourcils avant de récupérer mon parapluie, que j’avais déposé à côté, et lui tournai le dos tout en lui parlant d’une voix neutre.

Tu vas attraper froid si tu restes là, rentre te mettre au chaud idiot.    

Puis reprit ma route sans plus prêter attention au garçon.

J’aime pas la pluie

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Le garçon avait déjà quitté mes pensées, j’avais d’autres préoccupations en tête que de me soucier d'un étrange garçon trainant seul sous la pluie. S’il souhaite tomber malade, c’est son choix. Alors que j’étais maintenant dos lui et marchant en silence, je l’entendis m’adresser la parole à travers le bruit assourdissant de la pluie qui martelait mon parapluie. Pourquoi nous connaîtrions-nous ? Je m’arrêtai de marcher, mais ne me retournai pas pour autant, je n’avais pas l’intention de m’arrêter bien longtemps. Je détournai la tête à l’arrière pour regarder à nouveau le garçon. Il avait quitté le rocher et s’était approché de moi.

Même en l’observant rapidement une deuxième fois, j’étais certaine de ne jamais l’avoir croisé auparavant. Je n’aurais pas oublié un tel regard. Je reportai mes yeux devant moi tout en secouant la tête négativement.  

« Non, pas à ce que je sache. »

Je n’ajoutai rien de plus, mieux valait en rester là. Moins j’allais en dire, plus vite il va me laisser. Je  sentais qu’il voulait discuter, le simple fait qu’il se soit approché de moi suffisait à le justifier. Le problème est que moi j’en n’avais pas envie. Cela a été une mauvaise idée de ma part de le mettre en garde. Je ne sais pas ce qui m’a pris de lui parler, il savait sûrement déjà les risques de rester sous la pluie. Je n’avais pas besoin d’en rajouter.

Mais il me suivait. J’entendais  le bruit de ses pas un peu plus loin derrière moi. Que voulait-il ? Je lâchai un soupire et me retournai vers le garçon.

« J’espère bien que c’est parce que tu vis par là-bas que tu me suis. »

Surtout que ce n’était pas très discret de sa part. J’avais bien peur que j’allais devoir le côtoyer encore pendant un instant.  

J’aime pas la pluie

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Tout était dit derrière son « on peut dire », il ne disait pas totalement la vérité. Enfin, peu importe ce qui me cachait, il ne semblait pas vouloir me laisser pour autant. Je ne sais pas pourquoi il continue de me coller et je n’ai pas l’intention de débuter la conversation avec lui. Il va bien finir par comprendre qu’il n’aura pas ce qu’il voudra avec moi.

« Je n’ai jamais dit que c’était le cas, seulement je préfère être seule. »

Au moins, cela est dit. Il comprendra que je n’ai rien à faire de lui. Je le vis regarder les alentours, comme s’il cherchait une personne. Qui voudrait bien sortir avec un temps pareil ? À moins qu’il attende une personne, mais encore là, il me suivrait pas. Ce garçon à un comportement louche maintenant que j’y pense ou peut-être que je me fais juste des images. Je fronçai les sourcils face à sa question avant de me retourner et une nouvelle fois prendre la route.

« Qu’est-ce que ça change que je vis loin ou prêt ? »

Je vis loin, mais je préfère ne pas lui faire remarquer. Après tout, ce n’est pas de ses affaires. Je vis chez moi, c’est tout. Relevant les yeux en direction du ciel, je remarquai que la pluie n’était pas prête d’arrêter et je me souvins du garçon, complètement mouiller. Peut-être que je ne veux pas de lui, mais ce n’est pas une raison pour le laisser comme ça sous la pluie. Sans le regarder, je lui adressai une nouvelle fois la parole, malgré que je préférais éviter. Mais stade où j’en suis, il est trop tard pour l’éviter.

« Puisque nous empruntons le même chemin, autant venir t’abriter avec moi… »

En espérant qu’il ne reste pas trop longtemps…

J’aime pas la pluie

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Un simple remerciement suivis d’un hochement de tête venant de moi et le silence reprit place. Enfin silence, c’est un grand mot avec cette pluie qui martèle mon parapluie. Mais un bruissement beaucoup plus appréciable que le ton d’une voix. Enfaîte, c’est la pluie en elle-même que j’apprécie. La pluie emporte avec elle un ciel sombre et reposant, plus de soleil étouffant et aveuglant dirigé sur moi. De plus, elle faisait fuir les gens me permettant de me promener en toute tranquillité profitant du bruit apaisant du ruissellement de l'eau. Tout ça, si bien sûr on ne fait pas la malheureuse rencontre d’un étrange garçon trop curieux.

Un garçon, qui au passage, était plus grand que moi. Ce qui lui valut de devoir pencher la tête pour s’assurer de ne pas l’avoir dans le parapluie. En effet, il aurait été très simple de le remonter légèrement pour ne plus qu’il soit encombré, mais je ne veux pas lui permettre une telle faveur. Je l’avais autorisé à venir s’abriter avec moi et cela était déjà suffisant.

Je devrais m’inquiéter de la compagnie d’un garçon si curieux et qui se mêle de ce qui ne le regarde pas, pourtant ce détail ne me faisant ni chaud ni froid. Ça présence me dérangeait, mais je n’avais guère la tête à m’inquiéter. S’il tentait quoique ce soit, il aura tout simplement droit à un coup là où ça fait mal…

Alors que j’étais prise dans mes pensées, il vint une nouvelle fois me poser une question, me sortant de ma bulle. C’est question m’exaspérait et je ne faisais rien pour le cacher. Pourtant, je ne pouvais pas lui en vouloir, pas tout le monde est antisocial comme moi.

« Je rentre du boulot. Puisqu’on y est, je te renvoie la question. D’ailleurs cesse de me vouvoyez, on ne doit pas avoir une très grande différence d’âge. »

À moi qu’il aime patauger sous la pluie, ce qui m’étonnerait, je ne vois pas l’explication qu’il était là, seul. D’après ce que j’ai constaté, il cherche de la compagnie pour bavarder. Je ne pense donc pas qu’il soit été là pour chercher à être seul. Le plus juste serait qu’il se soit perdu et qu’il est profité de mon passage pour retrouver son chemin.

Au loin, j’aperçus le changement de décors, des édifices s’élevant devant nous. Nous approchâmes de la ville.

J’aime pas la pluie

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Ou encore qu’il se baladait tout simplement… Parfois je me demande comment je peux bien faire pour aller chercher des idées aussi loin alors que la véritable réponse et pourtant si simple. Après avoir laissé échapper un soupire, je me concentrai sur la route ignorant la présence du garçon. Rapidement, le teint verdoyant de la campagne se changea en couleur sobre de la ville. Le clappement de la pluie s’intensifia alors qu’elle frappait contre les taules des voitures longeant les routes.

Quelques piétons ayant été pris eux aussi par la pluie se précipitait sur les trottoirs enfin de s’abriter le plus rapidement possible. C’était tellement étrange de voir que deux environnements si différent et pourtant cohabiter l’un à côté de l’autre. En ville, les voitures circulaient comme bon leur semblait sur les routes, certains impolis venait même jusqu’à nous asperger. Une mère et son enfant passèrent même rapidement à côté de nous deux, fuyant l’orage. Ne savent-ils donc pas profiter de la beauté de cette averse ? Pourquoi sortir si c’est pour fuir comme des chats effrayés ?

Quant au garçon, il continua désespérément la conversation dans l’intention de continuer à me faire parler. Un détail m’étonnait dans cet « interview », une question primordiale qui n’avait pourtant pas prit la peine de la poser.

« Avant de me question sur tout cela, par politesse, ne devrais-tu pas me demander mon prénom ? Demander à une inconnue de raconter sa vie tandis que tu ne connais pas son nom, ce n’est pas très poli. »

Pour la première fois depuis notre rencontre, je tournai légèrement ma tête dans sa direction pour lui offrir un petit sourire amusée.

« Pour te répondre, je travaille comme vendeuse dans une boutique de vêtement. »