Sa voix la sortit de sa lassitude permanente. Elle n'en attendait pas moins, elle n'en espérait pas moi. Elle le détaille, elle observe ses contours. Dans un silence toujours éternel, à l'image de sa jeunesse, elle se contente de faire parler ses sens. Elle sait bien évidement, oui, elle sait qu'il n'est qu'une menace. Qu'un jour sans doute, il viendrait à disparaitre, tué par l'un de ses semblables. Elle le sait. Tout comme elle sait qu'elle ne sera pas celui-ci. Puisque Towa, aujourd'hui, est bien trop faible, bien trop insignifiante. Alors elle contemple son arrogance. Elle n'entend pourtant pas ses désirs. Elle n'entend que le son de sa voix, bien trop humaine à son gout. Mais elle l'oublierait bientôt. Ainsi n'était-elle pas différente de ceux-là qui lui réclamaient son attention. Ainsi ses, yeux posés sur lui jamais ne pourraient garder en mémoire ses moindres contours. C'était tout ce qu'elle était capable de penser devant l'être qui aurait pu simplement la faire disparaitre comme elle l'avait fait de nombreuses fois. Cela n'aurait évidement pas dérangé la femme qu'elle était alors. Elle n'avait après tout, que de vagues souhaits auxquels se raccrocher. Lorsqu'il s'éteint enfin, lorsqu'il l'attendit enfin, elle avait déjà fait son choix. Elle avait déjà décidé de suivre la route qu'on lui avait tracée. Et ce, depuis de nombreuses années. Cependant, ils furent interrompus. Ou tout du moins, ce silence qu'elle affectionnait, qu'ils auraient sans doute installé entre eux comme simple protection, fut balayé. Renié d'un simple claquement de langue, par de simples lèvres en mouvement. Elle n'écouta pas. Elle la vit, bien évidement. Simple morte. Simple Shinki en devenir. Opportuniste ou simplement indécise, elle n'aurait su dire. D'ailleurs elle,, ne lui adressa pas un mot. Towa se contenta simplement de réagir à son nom, de lui intimer le silence d'une simple main levée. Ha, Towa n'aurait pourtant voulu la froisser. Comme elle aurait voulut sans doute, ne jamais avoir à parler à un être démoniaque. Et pourtant, les deux cas s'ouvraient à elle, et pourtant, elle les provoquait de son propre grès. Son regard toujours obsédé par ce qui aurait dû être un homme. Par ce qui ne l'était pourtant pas. Ce ne fut néanmoins pas une chanson qui sortit de sa bouche à cet instant-là.

" Quel est votre souhait ? "

Puisque bien sûr, il avait payé. Puisque bien sûr, elle ne pouvait refuser de peur de voir son nom disparaitre, sans doute bien plus innocemment qu'il n'aurait pu rayer son existence. Towa détestait bien évidement cette idée. Mais elle ne le détestait pas, sans que cela soit pour autant de la sympathie ou de la pitié. Towa oublia juger par simple lassitude, ou par simple habitude. Quand on était un dieu comme elle, peu importe qui pouvait vieillir, elle n'aurait jamais été celle qui leur aurait pris la vie. Ni qui le leur aurait donné de nouveau. Alors elle se contenta de ramasser cette pièce tombée à ses côtés, de presser ses doigts frêles sur ce bout de métal tout lançant un dernier regard à la Shinki rester à ses côtés. Elle n'aura aimé la nommer dans le simple but de se défendre ici et maintenant sans jamais avoir eu la simple envie de le faire naturellement. Elle laissa ses lèvres s'étendre un sourire léger avec de sentir son corps frissonner dans la simple éventualité d'un combat.

Cela l'irrita fortement, sans pourtant savoir qu de ces deux personnes avait fait jaillir en elle ce genre de sentiment. Oui, cela l'irritait et elle n'en cherchait pourtant pas la raison. On ne lui aurait jamais d'ailleurs demandé quelle était celle-ci. Ils étaient bien trop bruyants pour elle, bien trop agités pour qu'elle ne sache vers qui diriger son attention. Alors elle se contentait de se demander si elle aurait dû accepter une pièce sans utilité. Si elle l'aurait pu d'ailleurs. Elle se contenta d'imiter son ancien possesseur. Elle se contenta de le regarder lui au travers de ce trou minuscule. Elle réalisa alors seulement la distance qui les séparaient tous les trois. Infime. Tellement infime. Elle se contenta pourtant de rester là, son visage toujours paisible. Après tout, c'était la seule facette de sa personnalité. Ou du moins, c'était la seule qu'elle laissa apparente, les traits de visages sans doute figé dans l'habitude. Elle n'en savait rien. Elle ne savait pas non plus ce qu'elle aurait dû faire dans telle situation. Elle ne n'en avait pas encore expérimenté de telle. Pas dans cette vie-là du moins. Bien sûr avait-elle encore ces quelques réflexes, ces quelques savoirs que l'on n'aurait pu lui enlever, mais c'était bien tout ce qu'il lui restait. Elle reposa ses mains sur ses genoux avec une lenteur qui paraissait presque banale chez une femme comme elle, en n'osant pourtant détacher son regard de ce qui était la raison de sa présence en ce monde. Towa savait qu'elle aurait dû porter la main sur lui. Qu'elle aurait dû laisser quelqu'un le faire pour elle. Quelque chose comme cela. Mais Towa sans doute jamais ne le ferait-elle. Bien aussi tordue que tant d'autre. Bien aussi tordue que celui qui se tenait devant elle, ou de celle qui se contentait de le défier à sa place.

" Je ne pense pas pouvoir vous être d'une grande utilité. "

Et devant ce qu'ils appelaient "démon", et se demandait pourquoi il devait avoir allure humaine. Elle se demandait comment elle aurait pu tuer quelqu'un qui possédait une telle allure. Là était le piège sans doute. Là était sa déception. Ce monde-là n'avait guère d'attrait. Ce monde-ci l'attirait pourtant encore. Sans doute parce que justement, ils s'agitaient encore à ses côtés. Et cela ne lui déplaisait pas.

" Je ne pense pas pouvoir vous aider à grandir ou à vieillir... "

Elle fit rouler sa pièce sous ses doigts. Hésitant à lui tendre sa main pour la lui rendre. Hésitant à briser les quelques barrières qui étaient encore siennes à présent. Puisqu'elle n'oubliait certainement pas sa nature. Parce qu'elle n'oubliait certainement pas son rôle. Bien qu'elle ne puisse l'exercer ici et maintenant. Bien qu'elle ne désire pas faire plus qu'exercer ce genre de pouvoirs sans grande utilité pour les êtres de son espèce. Oui, Towa se demandait simplement de quelle manière on pouvait exaucer un voeux. Alors que c'était bien évidement, ce qu'elle n'avait cessé de faire. Mais aujourd'hui, cela était bien différent. Elle ne pourrait évidement en exaucer aucun. Pas avec cette pièce-là du moins. Pas avec cette personne-là, ou pas pour le moment. Elle resta ainsi comme perdue entre deux mondes bien distincts. Comme perdue entre deux questions enfantines ou insensées pour un dieu. Ha, elle aurait donné n'importe quoi pour qu'ils ne lui laissent simplement son silence et quelques intentions. Rien de plus.